23 août 2022

Peut-on considérer la Suisse comme la rescapée de l’inflation mondiale ?

Les perspectives de l’économie Suisse tendent à dégrader les prévisions macroéconomiques du Secrétariat à l’économie (Seco).

En effet, les prévisions de croissance sont revues à la baisse et celles de l’inflation à la hausse.

Ainsi, on observe pour 2022, une croissance à 2.6% contre 2,8% annoncée.

D’ailleurs, l’année 2023 tient cette tendance avec 1,9% de croissance contre 2,0% estimée.

Néanmoins, la reprise est prévue à un rythme moins soutenu, selon la Seco.

La Guerre en Ukraine et l’impact de la pandémie sur la croissance en Chine explique la détérioration de ces perspectives.

L’inflation est revue à la hausse avec une moyenne annuelle de 2,5% alors qu’on l’attendait en mars 2022 à 1,9%.

Cependant, la hausse des prix devrait ralentir en 2023 à 1,4% contre une hausse affichée par la Seco en mars 2022 à 0,7%.

Nous l’abordions dans notre dernier article : « Pourquoi acheter un bien immobilier en Suisse redevient plus cher que la location ? », le prix de l’énergie et des denrées alimentaires a fortement augmenté au niveau mondial. Cela induit une pression importante sur la demande intérieure de certains partenaires commerciaux dont les répercussions sont négatives sur les branches exportatrices.

Mais alors, si la dynamique globale annonce les prémices d’une récession planétaire, pourquoi, peut-on considérer la Suisse comme la rescapée de l’inflation ?

Partons d’un constat…

L’économie Suisse souffre.

Les risques conjoncturels estimés en 2023 porteront sur l’inflation, les pénuries d’énergie et les problèmes d’approvisionnements.

Le mois de mai 2022 est révélateur de la plus forte hausse de l’inflation dans le pays, depuis 14 ans.

L’inflation attendue pour fin 2022 sera proche des 3%. Néanmoins, la fluctuation du cours de change de l’euro devrait augmenter les exportations de 4,7%.

Toutefois, l’indice des prix à la consommation a augmenté à de 2,9% en mai 2022, soit une hausse de 0,7% par rapport au mois précédent.

C’est édifiant, lorsque l’on sait que l’objectif de stabilité des prix de la BNS était défini à 2% maximum.

La guerre en Ukraine et les sanctions internationales à l’encontre de la Russie font envoler les prix du pétrole. De ce fait, les propriétaires et les locataires sont fortement impactés sur les prix du mazout (+81,9%) et du gaz (+40,7%).

Le transport n’est pas exempt de conséquences, puisque le diesel et l’essence ont respectivement bondi de 30,4% et 25,3%.

Par effet de ricochet, certains produits alimentaires tels que le melon, les raisins, les légumes-salades et les fruits à noyaux sont concernés par une hausse des prix.

Le rôle des banques centrales

Face à la hausse de l’inflation, le directeur de la banque nationale suisse (BNS), Thomas Jordan, a décidé d’augmenter son taux directeur de + 0,5%.

Bien que le taux directeur actuel soit à – 0,25%, l’ensemble des taux pourraient redevenir positifs.

La BNS souhaite transmettre un signal fort car la Suisse n’est pas le seul pays concerné par une forte hausse des taux.

En effet, la banque centrale américaine a augmenté son taux directeur de + 0,75%, pour atteindre désormais une fourchette qui se situe entre 2,25% et 2,50%, soit la plus forte hausse depuis 1994. Toutefois, les États-Unis distancent la Suisse avec un renchérissement de 8,6%, soit un impact multiplié par 3.

Compte tenu d’une inflation de 8,1% dans la zone euro et d’un pic de 20,1% en Estonie, les taux d’intérêt enregistré une hausse de +0,50% en juillet dernier.

Enfin, la banque d’Angleterre doit relever le défi de la stagflation, c’est-à-dire une inflation liée à une faible croissance économique.

En 2023, les prix devraient augmenter jusqu’à 11%. Le taux directeur actuel se situe à 1,25%.

Comment réagit le marché immobilier face à la hausse des taux d’intérêts ?

L’augmentation des taux d’intérêts renchérit le coût des prêts hypothécaires et donc le prix des maisons et des appartements.

À l’heure actuelle, la demande ne faiblit pas malgré un ralentissement annoncé.

La hausse des prix pour les appartements en propriété par étages a atteint + 0,8% mais la demande reste forte.

De plus, on observe une hausse des taux hypothécaires à 10 ans, entre 0,5% et 1% environ. Cependant, les acheteurs continuent de montrer leur intérêt car les principaux facteurs qui agissent sur les prix (l’immigration et l’activité économique) sont stables.

Le prix des immeubles de rendement a aussi augmenté (+6,4% sur une base annuelle). D’ailleurs, la hausse des taux par la BNS annonce des risques accrus. C’est pourquoi, l’investissement participatif immobilier n’a jamais autant été une alternative actuelle à l’investissement immobilier traditionnel.

Les Suisses sont moins inquiets de l’inflation que leurs voisins. C’est tout à fait normal, lorsque l’on sait que la Suisse est approximativement à 3% d’inflation contre 7% à 8% pour l’Allemagne et l’Autriche.

Que pouvons-nous en conclure… ?

L’inflation en Suisse reste très faible comparé à celle des pays de la zone euro et outre-Atlantique.

La force du franc n’est pas anodine suite à son appréciation délibérée par la BNS.

La devise a su freiner la hausse des prix des biens et des services importés malgré une progression constante, due à l’envolée des coûts de l’énergie et du transport.

Aussi, d’un point de vue structurel, la Suisse reste un îlot de cherté et limite la hausse des prix.

De plus, les entreprises suisses ont un niveau de marge plus élevé qu’ailleurs car :

  • la concurrence est moins forte dans certains secteurs.
  • il y a une concentration d’entreprises spécialisées dans des activités de niche plus élevée.

Si l’on se fie aux prévisions futures, les acteurs du marché ne s’attendent pas à ce que les banques centrales relèvent les taux d’intérêts avant 2023.

D’un autre côté, ils ne savent pas non plus si la hausse des taux d’intérêts par ces dernières mènerait à reprendre le contrôle de l’inflation.

Toutefois, les risques inflationnistes sont désormais pris au sérieux.

Actuellement, l’inflation en Suisse progresse toujours mais moins rapidement qu’il y a quelque mois et laisse présager (nous l’espérons), un retour à la stabilité de l’économie du pays et de l’appréciation du franc.

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