24 juillet 2025

Crise du logement en Suisse: hausse des expulsions locatives

Le marché locatif suisse est sous tension: pénurie de logements, loyers en hausse, ménages de plus en plus fragilisés… Résultat, les expulsions pour impayés s’envolent dans plusieurs villes. Et la récente baisse du taux d’intérêt de référence ne suffit pas à enrayer la tendance. Quels impacts pour les locataires et les investisseurs ?

En 2024, le nombre d’expulsions liées à des loyers impayés a connu une hausse significative. À Lausanne, les demandes d’expulsion sont passées de 103 en 2020 à 152 en 2024, soit une augmentation d’environ 50 %. À Genève, les forces de l’ordre ont conduit plus de 239 interventions de mise à la rue en 2024. À Yverdon-les-Bains, déjà 14 expulsions ont été enregistrées début 2025, dépassant le total de l’année précédente (source: tdg.ch).

Bien que ces expulsions ne concernent qu’une faible proportion du parc locatif (moins de 0,2 % des 82 650 logements disponibles à Lausanne), leur progression constante révèle des fractures sociales profondes. Cette tendance s’inscrit dans un contexte plus large de crise du logement, marqué par la hausse des loyers, la pénurie de logements abordables et la précarisation croissante des classes moyennes et défavorisées. Résultat: l’accès à un logement stable devient de plus en plus difficile pour les populations vulnérables.

Une offre de logements toujours insuffisante

Cette dynamique inquiétante trouve en partie son origine dans la pénurie chronique de logements, un facteur clé qui accentue la pression sur le marché locatif. À Genève, au 1er juin 2024, l’Office cantonal de la statistique (OCSTAT) faisait état d’un taux de vacance de seulement 0,46 %, un niveau largement inférieur au seuil de 1 % généralement considéré comme indicateur d’un marché équilibré (source: tdg.ch).

À l’échelle nationale, la situation n’est guère meilleure: le taux de logements vacants s’établissait à 1,08 % à la même période, traduisant une situation de pénurie bien réelle. Les experts estiment qu’un marché équilibré nécessiterait un taux avoisinant 1,27 % (source : wuestpartner.com). Dans ces conditions, les perspectives de relogement pour les ménages fragilisés restent sévèrement limitées, exacerbant ainsi les risques d’impayés et d’expulsions.

Un assouplissement des loyers, mais un impact limité sur la crise

Face à cette situation, les autorités ont tenté d’agir en assouplissant les conditions locatives. Le 3 mars 2025, l’Office fédéral du logement (OFL) a abaissé le taux d’intérêt de référence de 1,75 % à 1,50 % en réponse à la détente des taux hypothécaires. Cette décision ouvre la possibilité d’une réduction légale de loyer de 2,91 %. Concrètement, pour un loyer mensuel de CHF 2’500, cela représenterait une diminution brute de CHF 72,75. Après ajustement pour l’inflation et les frais d’entretien, le gain net se situe autour de CHF 50 à 55 par mois (source: watson.ch).

Cependant, ce mécanisme n’est pas automatique: la demande doit être formulée par écrit par le locataire et ne s’applique pas rétroactivement. Et surtout, cet allègement, bien qu’appréciable, reste insuffisant pour inverser la tendance sur un marché marqué par des déséquilibres structurels. Tant que l’offre de logements abordables ne sera pas significativement augmentée, la baisse des loyers ne pourra qu’atténuer partiellement la pression qui pèse sur les ménages les plus vulnérables.

Les implications pour les investisseurs : un nouveau paradigme à intégrer

Pour les investisseurs immobiliers, cette évolution du marché locatif suisse appelle à une adaptation stratégique. D’un côté, la montée des loyers impayés et des expulsions souligne la fragilité d’une partie croissante des ménages locataires. Pour les propriétaires privés et les investisseurs en PPE (propriété par étage), cela se traduit par un risque accru de vacance et des coûts supplémentaires liés aux procédures de recouvrement ou à la remise en état des biens.

Dans les grandes villes comme Genève, Lausanne et Zurich, historiquement réputées pour la stabilité de leur marché locatif, la situation exige désormais un affinage des critères de sélection des locataires et une gestion plus proactive des baux.

Parallèlement, la baisse du taux d’intérêt de référence contraint de nombreux bailleurs à revoir certains loyers à la baisse. Si l’impact financier peut paraître limité (réductions de 2 à 3 % en moyenne), il s’ajoute à d’autres pressions: hausse des coûts d’entretien, augmentation des charges énergétiques et incertitudes économiques globales. Cela réduit mécaniquement les rendements nets, en particulier pour les immeubles anciens ou énergivores, où les marges sont déjà étroites.

Pour les investisseurs en actionnariat participatif ou crowdfunding immobilier, ces risques sont partiellement dilués grâce à la mutualisation des revenus locatifs et à une sélection rigoureuse des projets proposés. Néanmoins, il est crucial de cibler des zones à forte demande locative structurelle et de privilégier des actifs alignés sur les standards ESG (efficacité énergétique, durabilité) pour sécuriser la valeur des portefeuilles sur le long terme.

Enfin, le marché immobilier suisse pourrait entrer dans une phase de stabilisation, voire de légères corrections, après plus d’une décennie de croissance soutenue. Les investisseurs avisés devront miser sur une diversification géographique et typologique, un suivi étroit des tendances démographiques et réglementaires, ainsi qu’une gestion plus active pour préserver leurs rendements.

Pour conclure, le marché locatif suisse reste sous forte pression, avec une pénurie persistante de logements et une hausse des expulsions. La récente baisse du taux d’intérêt de référence apporte un soulagement limité, insuffisant pour corriger les déséquilibres structurels.

Au-delà des aspects juridiques, les expulsions touchent particulièrement les populations vulnérables: familles monoparentales, seniors et ménages modestes. Malgré les aides existantes, ces mesures demeurent insuffisantes face à l’ampleur du défi.

Une mobilisation renforcée de tous les acteurs est donc indispensable pour prévenir ces situations et garantir un accès stable et digne au logement.

Pour les investisseurs, il devient crucial d’adopter des stratégies d’investissement plus sélectives et durables. Parallèlement, pouvoirs publics et acteurs privés doivent intensifier leurs efforts pour accroître l’offre de logements abordables et limiter les risques d’exclusion.

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